Laboratoire de la clinique de l’aéroport à Douala (Cameroun)
Introduites en Afrique subsaharienne à partir des années 1980-1990, les technologies de la reproduction sont encore largement méconnues. Leur émergence est intervenue dans un contexte sanitaire où l’offre de soins en santé de la reproduction est largement insuffisante. De nombreux couples deviennent stériles à la suite d’infections sexuellement transmissibles non traitées, ou pour les femmes, en raison de difficiles conditions d’accouchement, ou d’avortements pratiqués hors d’un contrôle médical. Face à la stigmatisation sociale et aux pressions familiales (risques de répudiation, divorce, polygamie) des couples inféconds se tournent, souvent à l’insu de la famille et de l’entourage, vers la fécondation in vitro au sein de cliniques privées de métropoles africaines. D’autres décident de partir à l’étranger, vers un pays voisin ou sur un autre continent, sur recommandation médicale ou par souci de confidentialité. Dans ce contexte, l’Assistance médicale à la procréation reste porteuse de profondes inégalités, puisque uniquement accessible aux classes moyennes. Mais il n’est pas rare que des couples peu fortunés en viennent à vendre des biens et à recourir à des prêts pour le paiement d’une fécondation in vitro.
La procréation médicalement assistée est une nouvelle façon de faire des enfants et donc de faire des parents. Elle révèle l’émergence de l’idée d’un enfant du couple et non plus seulement d’un enfant du lignage. Certes, elle répond à des objectifs thérapeutiques, mais elle est aussi emblématique d’un contexte africain urbain contemporain où mariage, sexualité, engendrement et parentalité peuvent être dissociés.
flyer-de l’ouvrage de Doris Bonnet et de Véronique Duchesne
A propos des conférencières
Bonnet Doris, directrice de recherche émérite en anthropologie à l’Institut de recherche pour le Développement (IRD), membre du CEPED (UMR 196), a mené des recherches en Afrique subsaharienne, en particulier au Burkina Faso, et auprès des migrants d’Ile de France originaires d’Afrique à l’hôpital Necker sur l’enfance et la santé. Elle est l’auteur de Corps biologique, corps social. La procréation et l’interprétation de la maladie de l’enfant chez les Moose du Burkina (1988, éd. de l’ORSTOM) et de Repenser l’hérédité (2009, éd. des Archives contemporaines). Elle a également participé à l’édition scientifique de Des maladies de passage. Transmissions, préventions et hygiène 2003, Karthala, en coll. avec Y. Jaffré), et de Modèles d’enfances. Successions, transformations, croisements (2012, éd. des Archives contemporaines, en coll. avec C. Rollet et C.-E. de Suremain).
Duchesne Véronique, maître de conférences en anthropologie à l’Université Paris Descartes (Sorbonne Paris Cité), est membre du Centre Population et Développement (CEPED, UMR 196). Ses recherches portent sur les circulations et innovations dans le champ de la santé en Afrique subsaharienne et sur la globalisation des « médecines traditionnelles africaines ». Elle a publié un ouvrage sur la divination en Côte d’Ivoire inttulé “Le cercle de kaolin. Boson et initiés en pays anyi”. (Côte d’Ivoire) et a participé à différents ouvrages et dictionnaires en anthropologie. Ses dernières contributions sont consacrées à l’AMP (revues : Cahiers du Genre ; Enfances Familles Générations).